Le Monde Diplomatique de novembre publie un article en première page intitulé: Les Ecologistes tentés par l’action directe. La journaliste montre comment de plus en plus de personnes sans passé militant rejoignent des groupes comme Greenpeace, Les Amis de la terre, Attac ou Sea Shepherd. « Ils ne croient plus la préservation de l’écosystème compatible avec le modèle capitaliste de croissance. » écrit-elle, et ils optent pour des actions plus musclées: blocage des ponts en ville de Lausanne avec Extinction rebellion ou décrochage du portrait d’E. Macron dans des mairies en France. « On a essayé de faire des plans avec les mairies, les collectivités, des marches…. Rien n’a bougé. J’ai ressenti la nécessité d’agir au-delà de ce qu’on avait déjà fait. », confie une militante. Entre l’Amazonie de Bolsonaro qui brûle et la fonte de la calote glacière, ces militants ne sont pas les seuls à avoir envie d’éviter la fin du monde.
La fin du monde c’est précisément sur cela que tablent des gens comme Bolsonaro ou Trump encouragés par des religieux fondamentalistes et ignares qui leur soufflent à l’oreille que la terre est vouée à la destruction selon ce que dit l’Apocalypse.
Dans l’Évangile de ce jour Jésus tient un discours apocalyptique en annonçant la ruine du Temple de Jérusalem:
» Comme certains disaient du Temple qu’il était orné de belles pierres et d’ex-voto, Jésus dit: « De tout ce que vous contemplez, il viendra des jours où il ne restera pas pierre sur pierre: tout sera détruit. » Ils interrogèrent Jésus en disant: « Maître, quand donc cela arrivera-t-il? Quel sera le signe que cela va arriver? » Jésus dit: « Prenez de ne pas vous laisser égarer. Beaucoup viendront qui prendront mon nom; ils diront: ‘C’est moi, et encore: ‘Le moment est arrivé’. Ne les suivez pas. Quand vous entendrez parler de guerres et de soulèvements, ne vous effrayez pas. Car il faut que cela arrive d’abord; mais ce ne sera pas aussitôt la fin. » Il leur disait alors: « On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume; il y aura des tremblements de terre et, par endroits, des pestes et des famines; il y aura des phénomènes terrifiants; de grands signes viendront du ciel. » Luc 21:5-11

A l’époque de Jésus, l’activité économique de Jérusalem tournait autour du Temple, des milliers de pèlerins généraient une manne financière qui assurait la prospérité de la ville. Quand Jésus annonce la destruction du Temple et donc la fin du système sacrificiel qui en était le moteur il annonce l’impensable. Pour les auditeurs de Jésus tout pouvait s’écrouler mais pas les emplois et l’économie que le Temple générait. Dire que le Temple allait s’effondrer c’était comme leur annoncer la fin du monde. Et ce n’était que le début disait-il, la ruine du Temple serait suivie de guerres, tremblements de terre, de pestes et de famines.
La fin du monde est une idée qui ressurgit avec le dérèglement de notre écosystème. L’Amazonie, poumon de la planète, brûle et avec elle l’équilibre des échanges atmosphériques qui nous sont vitaux. Pour certains spécialistes le point de basculement qui permettrait de sauver l’écosystème est dépassé.
Tout cela évoque un climat de fin du monde.
Et parce que l’angoisse d’Homo Sapiens est profondément enracinée en lui nous n’avons pas fini de nous faire des cheveux blancs. Les colapsologues vont nous indiquer le mur vers lequel nous nous précipitons et la sixième extinction de masse. D’autres diront que l’islamisation du monde est programmée et que c’est la fin de nos sociétés démocratiques et laïques. D’autres annoncent pêle-mêle un effondrement de la finance mondiale, un empoisonnement généralisé des populations par le glyphosate et une pandémie de cancers. On comprend que certains aient envie de partir à la campagne cultiver des légumes bio et vivre en autarcie dans la ferme de Pierre Rhabi.
Entendons-nous bien: la crise climatique est une réalité et nous allons vers des bouleversements profonds de nos modes d’existence. Aux réfugiés économiques vont s’ajouter des réfugiés climatiques et les pesticides ne vont pas disparaître de nos sols du jour au lendemain.
Faut-il pour autant tomber dans la dépression ? Jésus dans son discours sur les catastrophes à venir n’indique ni le désengagement ni une attitude démissionnaire.
Il le leur dit bien: « ne vous laissez pas égarer… ne vous effrayez pas…n’écoutez pas ceux qui vous disent mais oui ça ira ne t’inquiète pas… » Le remède du Christ contre la sinistrose du moment ce n’est pas la démission mais au contraire la militance, l’action responsable et lucide, la foi et l’espérance. De nouveaux rêves émergent quand s’écroulent les anciens. La réponse à tous les effondrements c’est la confiance et l’action semble-t-il dire: « …ne soyez pas effrayés. »
Quelqu’un a dit que toute croix conduisait au matin de Pâques. … c’est certainement ainsi qu’il faut comprendre la ruine du Temple annoncée par Jésus.
Richard Falo