Disciples ordinaires

Matthieu 4: 12-23

Il y a quelques années mon beau-frère me dit : « Si tu te mets sur LinkedIn, ou pourra communiquer plus facilement, car il habite Toulouse… » Bon… j’ai donc ouvert un compte sans réaliser que ce réseau social est en fait une plateforme où chacun se vend en tant qu’employé potentiel. Depuis j’ai des messages qui régulièrement me disent:  » Richard pour avoir plus de visiteur et être mieux repéré par un employeur faites ceci ou cela… » 

Évidemment quand on cherche du travail, ce qui n’est pas mon cas, on met en avant ses capacités professionnelles. 

Quand j’ai lu le passage de l’Évangile de ce jour je me suis posé la question de savoir pourquoi Jésus était parti à Capernaüm chercher ses premiers disciples. Capernaüm est un trou perdu au bord de la mer de Galilée où les chances qu’il y rencontre des gens bien formés à la création d’une nouvelle religion étaient plutôt minces. 

Jésus aurait pu aller à Jérusalem pour y recruter des étudiants de la Thora, des gens formés dans les écoles midrashiques qui passaient leur journées à étudier les Écritures. Il aurait pu aller s’établir à Tarse réputée pour ses centres d’enseignement ou Paul avait étudié la philosophie. Cet enseignement Paul, bien plus tard, le mettra au service de l’Evangile. 

On comprend que Jésus, pour des raisons de sécurité, quitte Jérusalem après l’exécution de Jean Baptiste, mais de là à venir s’enterrer à Capernaüm… Qu’il aille au moins s’établir à Nazareth, ville où il avait un réseau d’amis et des connaissances qui auraient pu l’aider. Le réseau d’amis c’était le LinkedIn de l’époque. 

Au lieu de cela il vient s’établir à Capernaüm et là on se dit qu’il va chercher l’appui des gens qui ont des moyens et de l’influence, les notables, la petite bourgeoisie, le Rotary Club du coin, ou L’Harmonie municipale … 

Non il trouve quatre humbles pêcheurs à qui il dit : « Suivez-moi et je vous ferai pêcher des hommes plutôt que du poisson… »

Comment se fait-il que Simon et son frère André et Jacques et son frère Jean aient laissé là leurs filets, barques et commerce de poisson pour le suivre ? Mystère ! 

A ce stade Jésus n’avait accompli aucun de ces miracles dont les récits le précédaient et qui en faisaient un personnage exotique.  

Certains pensent que Jésus était un de ces personnages qui ont une aura, une présence, un charisme qui attire les gens. D’autres pensent que Simon, André, Jacques et Jean étaient fatigués de leur existence monotone et qu’ils ont saisi la chance que Jésus leur offrait de voir un peu de pays.

Plus sérieusement on peut se demander si Jésus avec cette invitation claire et directe ne leur signifie pas qu’il sait exactement de quoi ils sont capables. 

Ils sont pêcheurs professionnels et pour prendre du poisson il faut savoir lire le lac, les vents et les courants. Il faut avoir de la patience un bon sens de l’observation et une bonne dose d’humilité pour ce qui est des dangers de la navigation. 

Il sait de quoi ils sont capables et va diriger leurs aptitudes vers un objectif plus ambitieux : ils vont sauver des gens du sentiment d’absurdité de leur existence. A ceux qui n’espèrent plus rien et ne trouvent plus aucun sens à ce qu’ils font, ils vont redonner espoir et confiance. Sauver des femmes et des hommes d’une vie au rabais et sans horizon.

Jésus va utiliser ce qu’ils ont appris dans leur métier de pêcheur pour transformer le monde.

C’est ce que Dieu fait. Dieu prend les gens les plus ordinaires et utilise ce qu’ils ont appris pour transformer le monde.

Certains ont accumulé du savoir par de longues études, d’autres ont développé un savoir faire ou une compétence particulière par l’expérience.

Dieu ne jette pas aux orties nos talents, toute capacité, tout savoir-faire est utile pour transformer le monde. 

Dieu appelle chacune et chacun de nous à œuvrer pour plus de justice et d’espérance et peu importe si nous pensons que nous n’avons rien à apporter pour contribuer à la transformation du monde ; Dieu lui le pense, bienvenus ! 

Richard Falo