Affronter nos peurs pour avancer

Le quatrième dimanche de Carême nous propose l’étrange histoire dite du « du serpent d’airain. ». Elle nous raconte comment les Israélites errent dans le désert depuis près de 40 ans. Dieu les avait conduits jusqu’aux portes de la terre promise, mais à l’exception de deux braves espions, les gens refusent d’y entrer car ils la croient habitée par des géants. Leur manque de confiance les contraint à errer dans ce désert auquel ils se condamnent eux-mêmes.

Ils ne se contentent pas d’errer mais se plaignent de leur sort. Leurs reproches sont une variation des thèmes rabâchés depuis longtemps : « Nous n’avons rien à manger si ce n’est cette manne matin, midi et soir. Au moins en Égypte nous avions des concombres, des oignons et des melons. Cette manne que Dieu nous donne nous en avons assez ! » Ils ne s’en prennent pas seulement à Moïse mais surtout à Dieu qui commence à être un peu fatigué de toutes ces jérémiades et qui révoque le pacte de non-agression par lequel il liait les serpents. Soudain vipères, cobras et autres sympathiques reptiles s’attaquent au peuple.  

Le peuple ne sait plus quoi faire et se tourne vers Moïse qui lui se tourne vers Dieu. 

La réponse de Dieu est suffisamment étrange pour attirer notre attention. « Fabrique un serpent de bronze, dit Dieu à Moïse, et fixe-le sur une perche. Celui qui regardera le serpent ne mourra pas des morsures. »  (Nombres 21 :4-9). Tout ce qu’ils ont à faire c’est lever les yeux et affronter ce qui les effraie. 

Cette étrange histoire, Jésus la rappelle à Nicodème : 

« De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »Jean 3, 14 – 21

Jésus établit donc un parallèle entre la manière dont Moïse a élevé le serpent sur un poteau et la manière dont lui aussi sera mis en croix. Pour Jésus, les deux images – serpent et croix – sont des moyens par lesquels nous sommes sauvés. 

Le serpent sur le bâton montrait aux Israélites ce qui les terrorisait, la croix nous montre ce que nous sommes capables de faire à un être humain. L’histoire du serpent de Moïse et l’histoire de la croix nous montrent à quel point nous avons déraillé. 

Une logique apparaît dans ces deux histoires : Pour guérir nous devons, à un moment donné, faire face à nos peurs, nos propres égarements, lâchetés et trahisons.  Nous devons affronter ce qui nous effraie et ronge de l’intérieur… 

Pendant le Carême la plupart des sermons tournent autour de la question du péché. Nous le signalons, puisque c’est de saison, et passons généralement à autre chose. Nous ne voulons pas vraiment parler de choses qui ont mal tourné. Des mécanismes qui nous amènent au rejet de groupes entiers ou celui qui considère planète et  personnes comme simples marchandises justes bonnes à être exploitées puis jetées.

Nous n’aimons pas en parler mais bien sûr, mais alors que nous sommes occupés à essayer de nous convaincre que tout va bien, le poison est déjà en train d’agir détruisant tout ce qui rend la vie belle et bonne.

Quand les Israélites ont regardé ce serpent de métal, ils ont vu ce qui allait les guérir. Quand nous regardons la croix, nous voyons jusqu’où nous pouvons aller dans le rejet de l’autre et dans nos cruautés. Mais nous nous trouvons aussi face au Christ. 

Nous n’aimons pas vraiment parler des choses qui nous font mal. Et pourtant, ce n’est que lorsque nous consentons à nommer ces choses qui nous détruisent et nous effraient que nous approchons du salut. 

St. Augustin le formulait ainsi : « « On regarde le serpent pour que le serpent n’ait aucun pouvoir. »

Gardons ce regard vers le Christ sauveur comme un regard qui guérit ! En reconnaissant ce que nous avons fait de la planète, et la pandémie en est une démonstration, nous n’avons pas le droit de céder au pessimisme. 

Dieu nous invite, après avoir osé regarder, à entrer dans l’engagement pour plus de justice. Il n’y a point de salut sans engagement. 

Nous percevons déjà des signes positifs de l’engagement des uns et des autres: la montée des mouvements citoyens, la mobilisation des jeunes pour plus de justice climatique et pour la paix, la dénonciation des populismes… Nous sommes encore loin du grand jour de la guérison du monde, mais des petites lumières percent déjà la nuit ici et là.

R. Falo

One Reply to “Affronter nos peurs pour avancer”

  1. Salut Richard, j espère que tu vas bien. Je viens de lire ton texte, et encore une fois bravo. Ce que j en retire c c’est l engagement, le courage et la force que l’on doit deploier face au mal de ce monde, et c’est en faisant cela que l on obtient le Salut. Encore merci Richard, à très vite j espère.

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